Le programme de physique de terminale comportait (avant 2011) l'étude du dipôle RC, et en particulier la charge d'un condensateur par un échelon de tension à travers une résistance, ainsi que sa décharge dans le même circuit.
Dans cette page, nous allons étudier l'excitation d'un dipôle RC série par une suite d'échelons de tension, c'est-à-dire par un signal rectangulaire. Cette étude trouve son prolongement dans plusieurs applications électroniques (filtrage, oscillateurs, etc.).
Voyons d'abord le schéma du montage électrique, au demeurant fort simple:
Le dipôle RC série est connecté aux bornes d'un générateur basses fréquences (GBF), qui délivre une tension U qui varie périodiquement entre -V0 et +V0. Pour notre étude, le domaine de fréquences sera de l'ordre de 0.1 kHz.
Pour étudier la "réponse" du condensateur aux variations brutales et périodiques de la tension appliquée à ses bornes, je vais connecter deux sondes reliées aux deux voies d'un oscilloscope:
Pour simplifier l'étude, on va se limiter à examiner ce qui se passe pendant une période quelconque du signal d'excitation, sachant que ce phénomène se reproduit périodiquement. Voici la forme de signal qu'on obtient avec un signal rectangulaire de 100 Hz, d'amplitude variant entre -5V et +5V, R valant 103 ohm et C 10-6 farad:
La courbe bleue représente le signal rectangulaire d'excitation (lu sur la voie 2) et la courbe rouge représente la tension aux bornes du condensateur (lue sur la voie 1).
Vous aurez noté qu'il ne s'agit d'une copie d'écran de scope (je n'ai pas d'oscillo double voie à portée de main) mais d'une restitution d'un programme de simulation (j'ai des ordinateurs à portée de main...). Deux premières observations à l'examen de cette courbe:
Sur un plan général, que constatons-nous ? Pendant la première demi-période:
Pendant la seconde demi-période:
Il convient de rappeler quelques notions fondamentales:
Pour aborder les problèmes de dipôle RC ou RLC,il est indispensable de bien connaitre ces différentes définitions.
A partir de la loi des mailles et des définitions rappelées ci-dessus, nous allons établir les équations différentielles de la charge et décharge d'un condensateur.
Ecrivons donc l'égalité que nous dicte la loi des mailles. A chaque instant, la tension u aux bornes du générateur est égale à la somme des tension uR aux bornes de la résistance R et v , la tension aux bornes du condensateur, soit
u = uR + v (1)
La loi d'Ohm nous permet d'exprimer autrement uR par uR = Ri
Dans la suite, pour alléger l'écriture, je ne le préciserai pas, mais il est évidemment que ces trois tensions dépendent du temps. Pour être formel et faire plaisir aux matheux, il faudrait écrire u(t), uR(t) et v(t).
Nous savons quelque chose sur v. Nous savons que q = C.v. Nous savons aussi que i = dq/dt. En combinant les deux équations, nous pouvons donc écrire i = Cdv/dt, en constatant que i = d(Cv)/dt = Cdv/dt.
Notons enfin que lors de la charge, la tension u est égale à +V0.
Replaçons ces différentes informations dans l'équation (1). Nous obtenons:
R*C*dv/dt + v = V0 (2)
Une équation différentielle de premier ordre avec un second membre constant... Elle a une solution analytique mais nous faisons ici de la physique numérique et donc des simulations... A titre d'exercice, cherchez donc la solution analytique, sachant qu'à t = 0 v = -V0!
Suivons la même démarche en appliquant la loi des mailles. La seule différence par rapport à la charge tient dans la valeur de la tension u, qui vaut maintenant -V0 et non plus V0. Ce qui nous donne l'équation différentielle:
R*C*dv/dt + v = -V0 (3)
Nous voilà prêt pour écrire notre programme simulation. Nous disposons de deux équations différentielles : une applicable pendant la charge, c'est à dire pendant une demi-période du cycle et l'autre applicable à la décharge, pendant l'autre demi-periode du cycle.
Nous fixerons comme condition initiale qu'au temps t=0, la tension v = V0. Le condensateur est supposé déchargé et sa tension de décharge égale à -V0.
Une remarque en passant: d'après le modèle mathématique de la charge/décharge, une charge (resp. une décharge) dure indéfiniment (c'est une fonction exponentielle asymptotique). Bien sûr, dans la réalité physique, la charge (resp. la décharge) est un phénomène limité dans le temps. Les modèles mathématiques ne sont pas la réalité physique...
Le programme complet en C, qui utilise la librairie graphique Dislin pour le tracé graphique, est téléchargeable ici. Les grandes composantes du programme sont communes à tous mes programmes. J'utilise mon schéma RK4 pour l'intégration de l'équation différentielle.
Celle-ci est décrite comme d'habitude dans la routine Derivee:
void Derivee(double Y[], double dY[])
{
dY[0] = 1/(R*C)*(-Y[0] + K*V0);
return;
}
Vous reconnaissez la forme de l'équation différentielle (2) ou (3). Je stocke dans dY la valeur de dv/dt et dans Y la valeur de v. Notez cependant une particularité: la présence d'une variable K, qui n'est pas présente dans les expressions (2) ou (3). En parcourant le code source, vous constaterez que K prend la valeur 1 ou -1 selon le temps dans le cycle. Cette "astuce" permet de traiter avec le même schéma numérique les deux équations différentielles.
A part ça, le code source ne présente pas de caractéristique notable!
Il vous reste à le compiler comme d'habitude dans un environnement comme Devccp ou VisualC (ou n'importe quel compilateur C). Pour l'exécuter, vous pouvez le lancer depuis l'environnement de développement ou bien depuis une console commande de Windows ou Linux.
Nota : j'ai écris un petit programme Maple qui fait exactement la même chose et que vous trouverez ici.
Au lancement du programme, vous devez saisir la valeur des différents paramètres de la simulation, comme il apparait sur la fenêtre suivante:
Le nombre de périodes à afficher ne doit pas être trop élevé pour faciliter la lecture des courbes. Disons qu'entre 3 et 5, c'est parfait. De même, ne montez pas trop en fréquence, car les courbes deviennent vite illisibles (ou bien modifiez le programme en conséquence). Le programme affiche la période du signal de charge ainsi que la constante de temps du circuit. On verra ce que cela signifie dans le prochain paragraphe.
Les équations différentielles (2) et (3) montrent que la variation de tension aux bornes du condensateur est proportionnelle au produit R*C. On appelle ce produit la "constante de temps" du circuit.
Vérifions d'abord que ce produit a bien la dimension d'un temps, ce qui serait préférable! La dimension de R est M.L2.A-2.T-3. La dimension de C est M-1.L-2.A2.T4. La dimension du produit a donc bien la dimension d'un temps. Pour plus de détails sur l'analyse dimensionnelle, voir ici.
La notion de constante de temps est une constante (!) dans les phénomènes exponentiels. Vous l'avez déjà approché lors de l'étude de la décroissance radioactive, sous une autre appellation (laquelle?). Elle donne un ordre de grandeur du temps de réalisation du phénomène.
A l'aide du programme de simulation, nous pouvons étudier l'influence respective de R et de C. Prenons pour référence les valeurs données ci-dessus, c'est à dire R = 103 ohm et C = 10-6 farad. Nous obtenons la courbe suivante:
La constante de temps du circuit vaut 10-3 s et la période du signal vaut 10-2 s. Le temps de charge du condensateur est significativement (un ordre de grandeur) plus petit que la période du signal. En fin de première demi-période, le condensateur est pratiquement chargé. De la même manière, en fin de deuxième demi-période, la décharge est pratiquement complète.
En gardant tous les autres paramètres identiques, portons la valeur de R de 1000 à 5000 ohms. Nous obtenons la courbe suivante:
Nous observons que le condensateur ne se charge ni ne se décharge plus complètement pendant chaque demi-periode. En effet, l'augmentation de la résistance limite le courant et donc le nombre de charges qui circulent pendant la durée d'une demi-periode. La constante de temps du circuit n'est plus petite devant la période, elle vaut avec cette valeur de R une demi-période seulement (0.005 s).
Faîtes l'expérience de réduire la valeur de R, par rapport à 103 ohms, en gardant constants les autres paramètres. Vous augmentez le débit de charges et vous constaterez que le condensateur se charge (resp. se décharge) bien plus vite dans une demi-periode. Pour R = 100 ohm, la courbe d'évolution de v (en rouge) suit pratiquement le signal d'excitation (en bleu):
Voyons maintenant ce qui se passe si je modifie la valeur C, en gardant tous les autres paramètres constants. Il est très probable que nous observerons les mêmes phénomènes car C intervient de la même manière dans le produit RC. Voici ce que cela donne en augmentant la valeur de C, c'est à dire en augmentant le nombre de charges nécessaires pour "remplir" le condensateur:
Sur cette courbe, la valeur de C est de 5 microfarad, soit 5 fois plus que la valeur initiale. Vous notez que le condensateur ne se charge (resp. se décharge) pas entièrement pendant la demi-periode.
Essayez d'augmenter encore la valeur de C. Vous trouverez un excellent moyen de convertir des signaux rectangulaires en signaux "dent de scie".
Pour finir cette page, mais pas vos expériences, examinons l'influence de la fréquence du signal d'excitation sur la charge et la décharge du condensateur.
Modifier la fréquence de ce signal revient à modifier la durée de charge ou de décharge du condensateur. On devrait donc observer des phénomènes identiques à ceux constatés lorsqu'on fait varier la constante de temps RC.
Voici la courbe pour F = 500 Hz, avec les valeurs habituelles pour R et C:
Nous avons augmenté la fréquence 5 fois et donc diminué 5 fois la période du signal. Et nous observons bien le phénomène attendu: le condensateur n'a pas le temps de se charger (resp. se décharger) pendant la demi-période.
Dans les mêmes conditions, diminuons maintenant la fréquence, nous obtenons:
La fréquence vaut ici 20 Hz. La période du signal est donc grande devant RC (resp 0.05s et 0.001s). Comme vu précédemment pour les faibles valeurs de R et/ou de C, la tension v aux bornes du condensateur suit pratiquement le signal d'excitation.
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